Le gars de Quiberon

G. Ruiz 1969

 

    C’était un gars de Quiberon,
Un grand et solide Breton,
Qui voulait par tous les moyens,
Faire cesser la vie de chien,
Que lui menait, quelle misère,
Sa belle-mère, une vraie mégère.
Ne pouvant, ni l’apprivoiser,
 Ni la chasser, ni la tuer,
 Il décida de mettre fin,
A ses maux dès le lendemain.

 Il quitta sa femme, ses enfants,
S’en alla gros Jean comme devant,
 En pensant pour sûr faire fortune,
En Amérique ou à Pampelune.
 Pour sa première randonnée,
 Il embarqua sur un thonier,
 Regrettant à tel point la terre,
  Qu’il en oubliait sa belle-mère.
 Foutue barcasse, se disait-il,
Elle est plus sale qu’un chenil,
Quand donc les maisons reverrai-je
De ma verte et natale berge ?

  Enfin d’escale à Saint-Malo,
Notre brave alla boire un pot,
 Disant qu’il avait de la chance,
De prendre ici quelques vacances.
Un pot n’est pas assez ma foi,
 Pour fêter une telle joie,
Le soir étant plus saoul que gai,
 S’en alla faire un tour su’l quai.
 Hélas le quai était glissant,
Et notre homme pas très vaillant,
Sur la dalle mouillée un faux pas,
Et tête en bas il se noya.

  La morale de ce récit,
Je vous la donne mes amis,
Vous matelots qui m’écoutez,
Retournez - tous dans vos foyers,
 On y meurt d’une belle mort,
Et pas souvent d’une belle mère.


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