La colline

(G. Ruiz Marseille  1971)


 Dans le ciel, une île,
Aux brumes de villes,
Blancheur ondulatoire,
Sous l'éclatant miroir,
Sans âmes et sans eaux,
Au roc de chaos,
Où la houle des vents,
S'effile en s'y perdant.
Sèches et mornes pentes,
Aux épines ardentes.
Au pied de dures cascades,
Des pins en enfilade,
Dont les membres noués,
Aux fibres pétrifiées,
De plaies vides de sang,
Invoquent les mouvants.
Et cette lèpre humaine
Rongeant toute la plaine,
De boursouflures d'acier,
De gerçures bétonnées.
Dans les terres fumigènes,
Dévorées de gangrène,
Les râles métalliques,
Des cœurs mécaniques.
Là où se multiplient,
Les êtres bactéries.
Monter plus haut encore,
Aux pylônes sémaphores,
Et des flaques de fer
Figées plus loin que terre,
Et les rivières de boue,
Fines fibres d'acajou,
Et l'amas microbien,
Néant pur et serein,
Et la cohue des villes,
Mosaïque immobile.
Puis bien plus haut encore,
Jusqu'à saisir le bord
Des masses nuageuses,
Aux traînées sulfureuses,
Et le halo diaphane,
De la ville océane,
Bientôt évanescent,
Comme dissout au vent.
Et le miracle dure,
La grisaille s'épure,
Les ruelles et les murs,
Les jardins de toitures,
En bas, dans la vallée,
Tout est net et rangé.
Et là-haut dans l'espace,
Au vol du rapace,
A des milliers de lieues,

La terre est lisse et bleue.

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